Réunion conjointe du G7 et du G5 Sahel
Réunion conjointe du G7 et du G5 Sahel
Les 4 et 5 juillet, les ministres de la Coopération du G7 et du G5 Sahel se sont réunis à Paris pour réfléchir à des solutions de sortie de crise, reposant sur le nexus sécurité – développement. Ils ont souligné l’importance de prendre des mesures fortes pour libérer le potentiel social et économique et traiter les causes structurelles de l’instabilité au Sahel. L’accent a été porté sur l’indispensable coordination et suivi dans l’action des bailleurs, où l’Alliance Sahel a un rôle clé à jouer.
Retour sur l’entièreté du communiqué conjoint:
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COMMUNIQUÉ CONJOINT DU G7 ET DU G5 SAHEL RÉUNIS À PARIS
1. Nous, ministres du G7 en charge de la coopération au développement et le Commissaire pour la coopération internationale et le développement de l’Union européenne, nous sommes réunis à Paris le 4 juillet 2019, pour la première fois dans ce format, avec nos homologues du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Niger et du Tchad, États membres du G5 Sahel. Prenant acte de l’urgence de la situation au Sahel, nous avons approuvé les actions suivantes :
1 – Défis de long terme et fragilités dans le Sahel
2. Il est nécessaire de prendre des mesures fortes pour libérer le potentiel social et économique et traiter les causes structurelles de l’instabilité au Sahel. Des défis urgents doivent encore être relevés, en particulier le manque de perspectives économiques et d’emplois, notamment pour les jeunes et les femmes, la limitation de l’accès aux ressources, aux systèmes de santé et autres services de base comme la justice, la nutrition, l’éducation et la protection sociale, ainsi que le déficit de gouvernance. Des tendances de long terme aggravent la complexité de ces enjeux et la vulnérabilité de la population. En raison du taux de croissance démographique, la population du Sahel aura doublé d’ici à 2040. L’accentuation des inégalités, notamment l’inégalité des chances, les inégalités territoriales, les inégalités entre les femmes et les hommes et le manque d’autonomisation des femmes, pourrait priver la région d’une grande partie de son potentiel humain et économique, tout en fournissant un terrain fertile pour les crises et les conflits. Des enjeux internationaux complexes et urgents, dont le changement climatique, la désertification, la dégradation de l’environnement et l’accès insuffisant à l’énergie, pourraient renforcer la vulnérabilité de la population, puisque 83 % des emplois dans les pays du G5 Sahel sont liés à l’économie de l’alimentation (OCDE/Club du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest).
3. Cette situation exige que des mesures fortes soient mises en oeuvre, dans un premier temps par les pays du Sahel, pour améliorer la gouvernance, la mobilisation des ressources domestiques, accroître les dépenses budgétaires et renforcer la capacité institutionnelle à fournir à chacun des services de base de qualité sans discrimination, puis dans un second temps par la communauté internationale, pour apporter un soutien accru, cohérent et coordonné à ces efforts.
2 – Développer les partenariats dans le Sahel
4. Soulignant l’importance systémique du développement et de la stabilité du Sahel pour l’Afrique subsaharienne et la communauté internationale, nous, membres du G7 et du G5
Sahel, appelons la communauté internationale à nouer de solides partenariats et à agir de façon coordonnée afin de contribuer à traiter les causes structurelles de la fragilité, des inégalités et de la pauvreté au Sahel. Nous nous engageons à renforcer le partenariat du G7 et du G5 Sahel, qui joue un rôle clé car le G7 fournit chaque année la moitié de l’aide publique au développement reçue par les pays du G5 Sahel. Nous reconnaissons également l’importance d’autres parties prenantes, telles que la société civile et les diasporas, qui peuvent jouer un rôle important dans le développement global de leur communauté dans leur pays d’origine.
5. Nous, membres du G7 et du G5 Sahel, appelons les principales organisations internationales et institutions financières à renforcer leurs efforts dans le Sahel. Nous insistons en particulier sur le rôle majeur joué par le Groupe de la Banque mondiale, le système des Nations Unies pour le développement, la Banque africaine de développement et l’Organisation de coopération et de développement économiques. Nous exprimons notre ferme soutien à la réussite de la dix-neuvième reconstitution des ressources de l’Association internationale de développement (IDA) et de la quinzième reconstitution des ressources du Fonds africain de développement (FAD), avec un rehaussement de la priorité accordée par ces deux fonds au traitement de la fragilité, notamment dans les États du G5 Sahel.
3 – Changer les méthodes : Alliance Sahel, articulation entre action humanitaire, développement et recherche de la paix, appropriation par le renforcement des capacités et mobilisation des ressources nationales
6. Nous, membres du G7 et du G5 Sahel, soulignons la nécessité pour les partenaires du développement, les organisations internationales et les institutions financières de coordonner leur action et leurs méthodes d’intervention sur le terrain, en étroite collaboration avec le G5 Sahel, aux niveaux régional et local et en pleine cohérence avec les priorités définies par le G5 Sahel dans sa Stratégie pour la sécurité et le développement et son Programme d’investissement prioritaire (PIP) 2019-2021. Nous saluons les efforts réalisés par l’intermédiaire de l’Alliance Sahel, créée en 2017, qui est un exemple de cadre innovant permettant de coordonner et d’assurer le suivi de l’action entre les bailleurs et les États partenaires. Nous sommes heureux d’annoncer aujourd’hui que tous les membres du G7 font à présent partie de cette alliance, en tant que membres ou observateurs.
7. Nous reconnaissons qu’il est nécessaire d’adopter et d’approfondir des approches globales qui soient entièrement compatibles avec l’articulation entre action humanitaire, développement et recherche de la paix. Nous soulignons la plus-value du partenariat entre le G7 et le G5 Sahel, le G5 Sahel ayant pour objectif de couvrir à la fois les stratégies de développement et de sécurité. Nous constatons que les besoins humanitaires urgents du Sahel ne sont pas satisfaits et nous demandons que la charge du financement des programmes d’urgence soit répartie à l’échelle internationale. Nous prenons note également des effets actuels de l’insécurité dans la région et de la nécessité de traiter les causes profondes de la violence.
8. Nous, membres du G7 et du G5 Sahel, soulignons qu’une appropriation accrue de la part des autorités nationales est indispensable, et nous nous engageons à intensifier le soutien apporté au renforcement des capacités des autorités nationales et locales pour leur permettre d’accomplir leur mission. Nous, pays du G7 et du G5 Sahel, soulignons qu’il est nécessaire de renforcer la mobilisation des ressources domestiques dans les pays du Sahel
ainsi que l’efficacité des dépenses publiques et de la gestion des finances publiques. Nous appelons les partenaires du développement à intensifier leur mobilisation dans les pays du Sahel pour cet ensemble de mesures liées aux financements publics. Nous continuerons à collaborer avec le Fonds monétaire international (FMI) pour déterminer comment les programmes soutenus par ce dernier peuvent se mettre au service de cet ensemble d’actions dans les pays à faible revenu, et en particulier dans les pays du Sahel, en nous appuyant sur les résultats de la Revue des facilités en faveur des pays à faible revenu et de l’Examen de la conditionnalité et de l’élaboration des programmes. Ces résultats ont pour objectif d’améliorer l’accès au financement concessionnel et d’augmenter la flexibilité et l’adéquation des programmes du FMI aux besoins spécifiques des pays, notamment la possibilité d’allonger la durée des programmes, au cas par cas. Nous demandons au FMI et au Groupe de la Banque mondiale, en collaboration avec d’autres partenaires du développement, y compris par l’intermédiaire de la Plateforme de collaboration sur les questions fiscales et de l’Initiative fiscale d’Addis-Abeba, de renforcer leur travail et leur coordination en faveur du renforcement des capacités en matière fiscale et de la gestion des finances publiques dans les pays du Sahel et les autres pays à faible revenu, en adaptant leurs efforts aux spécificités nationales. Nous réaffirmons également notre soutien à la poursuite de la mise en oeuvre de la stratégie pluridimensionnelle du FMI et du Groupe de la Banque mondiale visant à s’attaquer aux vulnérabilités émergentes liées à la dette.
4 – Une avancée importante en matière de développement humain
9. Nous, membres du G7 et du G5 Sahel, reconnaissons qu’il est nécessaire d’investir davantage dans le domaine du développement humain, notamment dans l’accès à la nutrition, à l’alimentation, à l’éducation et aux systèmes de santé ainsi que dans l’égalité entre les femmes et les hommes et l’autonomisation des femmes, qui est à la fois un vecteur majeur de croissance et une solution permettant de tirer parti du dividende démographique.
10. Dans ce contexte, nous, pays du G7 et du G5 Sahel :
– reconnaissons qu’il est nécessaire d’augmenter considérablement les dépenses publiques dans le domaine du développement humain, en accordant une attention particulière à l’autonomisation des femmes et des filles ;
– saluons l’initiative prise par le Burkina Faso, le Mali, le Niger, le Tchad, et la ferme intention de la Mauritanie, de rejoindre le Projet pour le capital humain de la Banque mondiale, qui témoigne de leur détermination à obtenir plus rapidement des résultats en matière de capital humain ainsi que d’améliorer leur score dans l’Indice du capital humain (Banque mondiale) ;
– appelons les organisations internationales et les institutions financières à agir davantage dans le domaine du développement humain dans le Sahel. En particulier, nous exprimons notre ferme soutien au Plan de la Banque mondiale pour le capital humain en Afrique, notamment à ses efforts consacrés à la région du Sahel, qui vise à accroître ses financements pour le développement humain jusqu’à atteindre 15 milliards de dollars des États-Unis entre 2021 et 2023 ;
– reconnaissons que la promotion de l’autonomisation des femmes, notamment de l’entrepreneuriat féminin, est une priorité. Nous soutenons les initiatives mises en oeuvre dans ce domaine, telles que l’Initiative de financement en faveur des femmes entrepreneures (We-Fi) et l’Initiative pour favoriser l’accès des femmes au financement en Afrique (Afawa), lancée par la Banque africaine de développement ;
– nous engageons à faire avancer notre coopération ensemble et avec les autres parties prenantes concernées, pour accélérer les progrès de la lutte contre toutes les formes de malnutrition, dans le cadre d’approches systémiques, notamment en renforçant la place de la nutrition dans les systèmes de santé et en promouvant des systèmes alimentaires résilients et durables qui prennent en compte la nutrition. Le Sommet Nutrition pour la croissance qui aura lieu à Tokyo en 2020 sera un moment essentiel pour définir des actions clés. Nous soutenons l’initiative « Renforcer la nutrition » qui facilite des modes d’action transversaux et aide à rehausser l’impulsion politique. Nous, pays du G5 Sahel, accélérerons la mise en oeuvre de nos plans d’action nationaux multisectoriels en matière de nutrition. Nous, membres du G7, améliorerons la cohérence de nos actions en faveur de la nutrition dans la région, notamment par l’intermédiaire d’approches multi bailleurs ;
– soulignons que pour mettre fin à l’insécurité alimentaire, il est nécessaire de traiter les causes structurelles de la pauvreté, notamment par la création d’emplois décents. Nous, ministres du développement du G7 et ministres du G5 Sahel, saluons le cadre du G7 sur la création d’emplois décents pour les jeunes ruraux du Sahel produit par le groupe de travail du G7 sur la sécurité alimentaire. Nous, pays du G5 Sahel, travaillerons avec nos partenaires du G7 pour lutter contre les facteurs de chômage des jeunes dans les zones rurales ;
– nous engageons à intensifier le renforcement des systèmes de santé dans tous les pays, en accordant une attention particulière aux soins de santé primaires, qui constituent un élément clé en vue de progresser vers la réalisation de la couverture sanitaire universelle. Nous soutenons l’élargissement de l’espace budgétaire pour la santé et encourageons les pays du Sahel à accroître l’investissement public dans les soins de santé primaires, en particulier pour créer des emplois dans le domaine de la santé, conformément à l’Appel à l’action de l’Union africaine. Nous nous engageons à améliorer le bien-être des femmes et des filles et à contribuer aux potentiels bénéfices économiques et sociaux dans la région du Sahel, au travers de partenariats régionaux, comme le partenariat de Ouagadougou. Nous nous engageons à favoriser le succès de la sixième Conférence de reconstitution des ressources du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, que la France est heureuse d’accueillir le 10 octobre 2019 à Lyon, et qui a pour ambition d’atteindre au moins 14 milliards de dollars des États-Unis pour le cycle 2020-2022 pour lutter contre ces trois maladies, y compris à travers la construction de systèmes résistants et pérennes pour la santé.
11. Convaincus de la valeur ajoutée d’un partenariat robuste entre le G7 et le G5 Sahel, fondé sur la compréhension commune des défis de long terme à relever dans la région, nous sommes prêts à travailler ensemble dans les années à venir et à coordonner nos efforts au sein de toutes les institutions multilatérales concernées, dans un esprit de transparence mutuelle et de responsabilité, afin de fournir des perspectives aux jeunes de la région du Sahel et de leur redonner espoir.