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Déclaration de l’Alliance Sahel sur la mise en œuvre de la résolution UN 1325 – femmes, paix et sécurité – au Sahel

14 Décembre 2020 – La Ministre espagnole des Affaires étrangères, de l’Union européenne et de la Coopération en sa qualité de Présidente de l’Assemblée générale de Alliance Sahel fait aujourd’hui la déclaration ci-après :

Les populations sahéliennes font face à des crises et conflits multiformes. L’insécurité, la pauvreté, les pressions démographiques ou le changement climatique, pour ne citer que ces facteurs, font que beaucoup de Sahélien(ne)s se sentent exclu(e)s du développement, en particulier les plus vulnérables. Les femmes et les filles ne jouissent pas d’un plein accès à leurs droits de participation à la société dans toutes leurs dimensions, sociaux, économiques, culturels et politiques. Elles sont soumises à de multiples formes de violence et de discrimination. La région continue de présenter des indicateurs de genre parmi les plus faibles au monde dans de nombreux domaines (éducation, santé, économie, accès au foncier et à la justice, violences basées sur le genre). En outre, la détérioration de la situation sécuritaire, et les conséquences de la pandémie de COVID-19 ont mis en lumière l’impact accru que les chocs ont sur les femmes et les filles.

L’année 2020 marque le 20ème anniversaire de l’adoption de la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies (UNSCR 1325) portant sur les femmes, la paix et la sécurité. Elle met en exergue l’impact disproportionné des conflits sur les femmes et les filles au Sahel et le nécessaire engagement des pays sahéliens pour leur protection. Elle souligne que les femmes sont acteurs de la construction d’une paix durable, tant au niveau local au sein des communautés, qu’au niveau national dans les instances décisionnelles. Elle rappelle l’obligation des États de mettre fin à l’impunité et de poursuivre en justice les responsables de violence sexuelle et d’exactions. Elle enjoint à systématiser une approche d’égalité de genre et sexospécifique et souligne l’importance de prendre en compte la voix, les capacités et les initiatives des femmes dans la prévention et la solution des conflits, leur médiation et la consolidation de la paix.

L’Alliance Sahel a décidé de concentrer ses efforts dans six secteurs prioritaires, qui forment le socle de son engagement au Sahel. Ces piliers ont des intersections fortes avec l’égalité de genre et les droits des femmes et des filles. En adoptant la Feuille de Route Genre de l’Alliance Sahel en 2019, les membres se sont engagés à renforcer le dialogue avec leurs partenaires sur cette thématique transversale, afin de mieux prendre en compte les préoccupations et les enjeux liés au genre. Ils se sont également engagés à mettre en place des projets et programmes dédiés au genre et à plaider au niveau politique en vue d’une meilleure prise en compte des droits des femmes et des filles.

Il est urgent d’intensifier les efforts pour accélérer la mise en oeuvre au Sahel de la résolution 1325 du CSNU et des résolutions suivantes sur les femmes, la paix et la securité pour avancer dans l’égalité de genre. Malgré le rôle essentiel des femmes dans la médiation, le plaidoyer et la gestion des conflits, le niveau d’autonomisation et de représentation politique de ces dernières dans les pays du G5 Sahel reste faible. Il est urgent de continuer à se mobiliser pour garantir les droits des femmes et des filles, promouvoir leur rôle dans les opérations de paix, les missions de sécurité et les processus de paix et de transitions politiques, et leur donner les moyens d’avoir une représentation et un pouvoir égaux dans les processus et les instances de décision.

Les membres de l’Alliance Sahel sont fortement mobilisés pour répondre à ces enjeux et renforcer l’intégration de l’agenda UNSCR 1325 dans ses messages politiques. Nous nous engageons notamment à :

1. Accroître le nombre de projets et de programmes qui ciblent l’égalité de genre, la promotion, la protection des droits et l’autonomisation des femmes et des filles, et en améliorer la redevabilité. Sur l’ensemble des projets de l’Alliance Sahel en cours en 2018, plus de la moitié (59%) n’étaient pas en mesure de fournir des informations sur l’intégration de la dimension genre. Sur les 262 projets pour lesquels des données sont disponibles, 70% intègre le genre ou ont pour objectif premier d’améliorer l’égalité de genre.

2. Accompagner les pays et le Secrétariat exécutif du G5 Sahel dans leurs efforts pour adopter un cadre institutionnel et juridique favorable et des politiques volontaristes en matière de promotion de l’égalité effective entre les sexes et de protection des droits des femmes et des filles. Identifier les obstacles à l’égalité effective de genre et les traiter dans les principales instances de dialogue de l’Alliance Sahel avec ses partenaires, en s’appuyant notamment sur des initiatives comme la plateforme des femmes du G5 Sahel. Appuyer l’adoption et l’exécution des Plans nationaux d’action (PNA) pour la mise en œuvre des résolutions et de l’agenda femmes-paix-sécurité.

3. Renforcer les partenariats, tant entre membres de l’Alliance Sahel qu’avec les partenaires nationaux, les acteurs locaux et les organisations de la société civile, pour améliorer la compréhension collective des enjeux et des défis liés à l’égalité de genre, pour renforcer l’intégration de l’agenda femmes, paix et sécurité, de la résolution UNSCR 1325 et des résolutions suivantes, pour assurer une meilleure coordination des politiques publiques et des projets.

Une mobilisation concrète – Présentation de quelques projets emblématiques visant une amélioration de l’égalité de genre, financés par les membres de l’Alliance Sahel dans les pays du G5 :

– Au Burkina Faso, le projet Autonomisation, accès à la santé sexuelle et reproductive et meilleure implication des femmes et jeunes vulnérables dans la protection de l’environnement et la prévention et la gestion des conflits, financé par le Luxembourg à hauteur de 5 millions d’Euros, promeut l’autonomisation des femmes et des adolescent(e)s vulnérables/marginalisés, le respect de leurs droits en matière de santé sexuelle et reproductive, leur implication dans la protection de l’environnement et la prévention et la gestion pacifique des conflits.

– En Mauritanie, le projet Renforcement des capacités de la police mauritanienne en matière de traitement des violences basées sur le genre (VBG), financé par l’agence de coopération espagnole (AECID), intervient au niveau des forces de police (notamment la brigade des mineurs) pour sensibiliser aux VBG (sexuelles en particulier) et en améliorer les procédures de traitement. Le projet a permis de renforcer les capacités de la police à apporter une réponse adéquate aux victimes et à améliorer la collaboration institutionnelle avec les services de santé pour leur prise en charge médicale. Un plan de prévention des VBG, avec l’implication des acteurs clefs pour la protection des droits (autorités locales, personnels de justice et de police, société civile) a été également élaboré, ainsi qu’un plan de communication pour renforcer la déstigmatisation sociale des victimes.

– Au Tchad, les 3 phases du projet Améliorer les chances de survie et de développement des enfants financés par la coopération allemande à hauteur de 33 millions d’euros contribuent à réduire la mortalité maternelle et infantile en améliorant la qualité des services de santé et en sensibilisant les femmes enceintes et allaitantes à la nécessité d’avoir recours à ces derniers.

– Au Niger et au Tchad, le projet ¨Redressement Economique et Social Inclusif du Lac Tchad (co-financé à hauteur de 36 millions d’euros par l’Agence française de développement et l’Union Européenne, avec un appui de 500 k€ du Royaume-Uni dédié au genre), qui vise notamment à soutenir une économie locale durable et à renforcer la cohésion sociale, prend en compte la dimension genre dans l’ensemble de ses composantes pour répondre aux besoins spécifiques des femmes et des filles.

– Au Mali, au Niger et au Tchad, le projet Autonomisation économique des femmes vulnérables, financé par le Banque africaine de développement vise à améliorer l’accès des femmes et des jeunes femmes aux ressources économiques et à renforcer la résilience économique des ménages dans les zones exposées à la violence. Le projet finance des activités génératrices de revenus (touchant l’agriculture, l’élevage, le commerce et l’artisanat), le renforcement de capacités entrepreneuriales des femmes et du dialogue politique pour un environnement favorable à la réduction des disparités entre les genres dans l’accès aux ressources économiques.

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