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Investir pour prévenir les VBG: l’Alliance Sahel s’engage résolument!

« Regardez mes pieds, je ne suis pas née comme ça. On m’a tenue responsable de la mort d’un enfant. J’ai nié en vain.  Ils m’ont chassée, blessée et m’ont amputée de mes orteils… Je ne pouvais pas me défendre. Je me suis retrouvée dans ce centre… La justice a condamné mes bourreaux à une amende. Mais je n’ai jamais été payée et je n’ai jamais pu réintégrer ma famille. »

Ceci est le poignant témoignage d’Antoinette, pensionnaire du Centre Delwendé accueillant des femmes accusées de sorcellerie au Burkina Faso.  

L’histoire d’Antoinette n’est malheureusement pas un cas isolé. La violence sexuelle et sexiste (VSBG) frappe de façon disproportionnée les femmes et les filles dans tous les pays et dans toutes les sociétés, y compris dans les situations de conflit, à la maison, à l’école, dans la rue, au travail, sur Internet et dans les camps de réfugiés.

Cependant, les violences basées sur le genre (VBG) explosent dans la région du Sahel Central et au Tchad à mesure que la situation humanitaire se détériore. Des données précises et actuelles fournissent des informations essentielles pour éclairer la fourniture de soutien et d’assistance. La détérioration de la sécurité entraine le déplacement massif de populations.

Les femmes et les filles sont particulièrement impactées par les crises sécuritaires. Les chiffres récemment publiés par OCHA et le projet 21 sont parlants:

  • les incidents de protection ont augmenté de 20% entre 2022 et 2023
  • 1 incident de protection sur 9 relève de VBG, atteignant dans certaines zones le ratio d’1 pour 5
  • En 2023, plus de 40% des victimes de VBG n’ont pas accès aux services sociaux et/ou de santé adéquats.

La prévalence de la violence sexiste au Sahel est vraiment alarmante. Mettre fin à la violence sexiste est une priorité pour le Royaume Uni. Placer les organisations de défense des droits des femmes au cœur de notre approche est essentiel pour réussir. Pour ces 16 jours d’activisme contre la violence sexiste, célébrons leurs efforts. » (propos traduit de l’anglais)

Alicia Herbert, Director, Education, Gender and Equality and Gender Envoy de FCDO

Un engagement partagé par plusieurs membres de l’Alliance Sahel

La violence à l’égard des femmes est l’une des violations des droits humains fondamentaux les plus fréquentes dans le monde. Elle reste l’un des principaux obstacles au développement, à l’épanouissement – physique et émotionnel – et à la participation égale des femmes et des filles à la vie politique, économique et sociale.

C’est un problème structurel, conséquence de l’inégalité entre les femmes et les hommes dans la société, et en particulier dans le partage du pouvoir. C’est pourquoi, en tant qu’agence féministe, l’AFD s’investit aux côtés de ses partenaires pour la prise en compte des enjeux de genre dans tous ses projets et finance les organisations de la société civile féministes, à travers le Fonds de soutien aux organisations féministes. Celles-ci disposent des connaissances, de l’expérience et de l’engagement nécessaires pour accompagner des changements durables de mentalités et de comportements, au bénéfice de l’ensemble des sociétés. »

Céline Gilquin, Responsable de la Division lien social de l’Agence française de développement

Trop souvent, la violence contre les femmes et les filles est normalisée et reste impunie. C’est pourquoi la Politique d’aide internationale féministe du Canada place l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes et des filles, dans toute leur diversité, au centre de son aide internationale et s’engage à s’attaquer à ces taux inacceptables de violence subies par les femmes et les filles. 

Mme Amrita Paul, Director, Education, Child Protection, and Prevention of Gender-Based Violence and Harmful Practices Global Affairs Canada précise:

Cela comprend le soutien d’approches globales qui aident à mettre fin à la violence sexuelle et sexiste et à lutter contre les normes sociales et les inégalités entre les sexes, qui sont les causes profondes de la violence sexuelle et sexiste et des pratiques nuisibles telles que les mariages d’enfants, les mariages précoces et forcés et les mutilations génitales féminines/excision. » (propos traduit de l’anglais)

Si les situations de violences sont plus évidentes dans les contextes de crise et de conflit, les femmes et les filles sont aussi vulnérables dans la vie quotidienne, en particulier au sein de la famille. La dissimulation des VBG engendre des risques accrus pour les victimes, vu que le foyer est précisément l’espace où se produisent la plupart des agressions subies.

En effet, la majorité des cas de violence est commise dans le contexte d’une relation intime, par le mari ou le partenaire actuel ou passé, selon des données de l’ONU Femmes. C’est exactement pour cette raison que le nombre de cas de violence domestique a augmenté pendant les périodes de confinement lors de la pandémie de Covid-19. Les situations de violence domestique et conjugale sont un enjeu important, d’autant plus que ces comportements sont reproduits par les enfants témoins et se transmettent de génération en génération.

Les violences basées sur le genre: un enjeu transversal et prioritaire

Les violences basées sur le genre sont donc à un enjeu transversal et prioritaire à tous les secteurs d’intervention de l’Alliance Sahel: infrastructure, mobilité et transport, éducation, climat et biodiversité, santé, eau et assainissement.

Les projets sont donc conçus en prenant en compte les contextes locaux pour ne pas aggraver ces violences, ou même pour les réduire, et pour appréhender et traiter les risques d’augmentation des violences, en identifiant les leviers et alliances potentiels ou déjà existants.

Par exemple, le Partenariat EDIFIS fédère progressivement les ressources et expertises de multiples partenaires comme le groupe AFD-Expertise France, ONU Femmes (Women Count), l’Etat du Sénégal et des organisations de la société civile au Sahel, pour s’attaquer résolument aux pratiques de VBG. Et ce, à travers notamment la prévention, le plaidoyer, l’éveil des consciences à la nécessité et l’importance d’une société égalitaire, la sensibilisation à la paix par le cinéma, la production de données statistiques pour nourrir le dialogue de politique publique, orienter les décisions et les actions politiques en faveur de l’égalité des sexes et de l’autonomisation économique des femmes.

La Banque africaine de Développement (BAD) s’investit au bénéfice de tous, pour évaluer l’état de l’égalité du genre, par la production régulière de l’Indice de l’Égalité des Genre en Afrique qui mesure trois dimensions: économique, sociale, représentation et autonomisation.

Comme le relève Aissatou Aïda Dosso, Chargée principale Genre et Innovation au sein de la Banque africaine de Développement (BAD):

On remarque que les inégalités sur ces trois dimensions sont les plus accrues dans la région du Sahel. Le score régional du Sahel est de 32,4% pour l’ensemble des 5 pays de l’espace du G5 Sahel. Il en résulte un écart entre les sexes de 67,6% sur ces 3 dimensions. »

Depuis de nombreuses années, l’UE investit dans la prévention et la protection, qui sont des piliers fondamentaux dans la lutte contre la violence sexiste. La prévention est essentielle pour briser le cercle vicieux qui perpétue la violence, et permet de préserver le bien-être immédiat des victimes et des survivants. L’UE s’investit aussi dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles, via une approche globale et transformatrice qui s’attaque aux causes profondes au niveau sociétal, culturel et individuel. En 2021-2022, l’Union européenne a investi 22,4 milliards d’euros pour la construction d’un monde égalitaire entre les sexes.

En outre, l’UE soutient fermement la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations unies et les résolutions ultérieures sur les femmes, la paix et la sécurité, soulignant l’impératif de protéger les femmes et les filles pendant les conflits et les crises, y compris contre les violences sexuelles et sexistes. De plus, il plaide en faveur du leadership des femmes et de leur participation significative aux efforts de résolution des conflits, reconnaissant leur rôle crucial dans la promotion de la stabilité, de la réconciliation et de la résolution des conflits au sein des communautés. 

Les liens entre pauvreté, facteurs de stress et difficultés financières et violence à l’égard des femmes sont établis par diverses études, les femmes étant exposées à des risques disproportionnellement élevés de violence. Dans le même temps, la violence augmente le risque de pauvreté et de difficultés économiques des femmes en raison, à la fois, des coûts directs de la violence, tels que les dépenses de santé à la charge des patients, et des coûts indirects tels que la réduction des revenus. Au-delà de la violation des droits des femmes, les VBG portent un réel préjudice au développement.

La bonne nouvelle, c’est que les VBG sont évitables et qu’il existe plus de preuves que jamais sur ce qui fonctionne pour prévenir et lutter contre ce phénomène.

C’est pourquoi, les partenaires de l’Alliance Sahel s’engagent avec leurs partenaires étatiques et de la société civile au Sahel et mobilisent ensemble leurs ressources pour cette cause commune.


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