Actualités et Presse

Le climat, un axe indissociable du nexus humanitaire – sécurité – développement

Les effets du changement climatique au Sahel fragilisent non seulement les écosystèmes, mais également les économies et les acquis en termes de développement. Les phénomènes météorologiques extrêmes, les sécheresses récurrentes et les inondations engendrent une raréfaction des ressources. Ils contribuent à la multiplication des crises dans une région déjà en proie à l’extrême pauvreté et à l’insécurité. Les populations sahéliennes sont d’autant plus affectées que leurs moyens de subsistance et de production dépendent directement des ressources naturelles et des rendements issus de l’agriculture, de l’élevage, et de la pêche.

La Banque mondiale estime que plus de 13 millions de personnes dans le Sahel* pourraient tomber dans la pauvreté en raison des chocs liés au changement climatique d’ici 2050 si des mesures d’adaptation au climat ne sont pas prises d’urgence.

Par ailleurs, l’accès aux ressources naturelles ainsi que la dégradation de la fertilité des terres sont vecteurs de conflits. Ceci notamment entre agriculteurs et éleveurs, et entraînent d’importants mouvements de déplacements de populations. Les dispositifs de règlements des conflits traditionnels et locaux qui constituent un facteur de résilience des communautés sont déstabilisés et fragilisés par l’insécurité qui sévit dans la région.

Les enjeux climatiques sont au cœur de l’action de l’Alliance Sahel

Fin 2022, les membres de l’Alliance Sahel finançaient 446 projets ayant un objectif principal ou significatif d’adaptation et d’atténuation au changement climatique pour près de 9,2 milliards d’euros, notamment au travers d’initiatives telles que la Grande muraille verte ou Desert to Power.

Les efforts conjoints doivent néanmoins être renforcés, y compris dans une approche de prévention des crises. Pour parvenir à un développement durable, le climat doit demeurer un des axes principaux de travail pour le nexus humanitaire – sécurité – développement.

L’Assemblée Générale de l’Alliance Sahel réunie le 10 juillet dernier a décidé de concentrer son action sur 3 priorités :

  • la création d’opportunités d’emplois et de revenus pour la jeunesse par l’éducation, la formation et l’entrepreneuriat
  • la résilience aux chocs notamment climatiques par le renforcement des systèmes agricoles et alimentaires ou l’appui aux dispositifs de protection sociale adaptative
  • le développement des territoires et l’accès aux services de base

Elle a également proposé une déclinaison opérationnelle de ces priorités par la promotion d’initiatives conjointes Alliance Sahel. Soutenues par plusieurs membres, elles peuvent être des programmes nouveaux, ou consister au passage à l’échelle de programmes existants ayant démontré des résultats et des impacts significatifs.

Groupement de femmes maraîchères dans le Kanem au Tchad, soutenues dans l’amélioration de leurs pratiques agricoles par le projet DETEKANEM, financé par l’AFD

Des engagements concrets pour renforcer la résilience aux chocs

L’Alliance Sahel travaille activement avec ses partenaires sahéliens sur le renforcement de la résilience aux chocs, y compris climatiques, tant par le prisme du renforcement des systèmes agricoles et alimentaires que celui des systèmes de protection sociale adaptative.

Un séminaire a eu lieu à Dakar le 8 novembre dernier pour comprendre les dynamiques des facteurs de fragilités des systèmes agricoles, alimentaires dans un contexte de crise.

Associant les ministères de l’agriculture des pays du Sahel, les organisations régionales, la société civile et des think tank, les analyses partagées ont mis en lumière le potentiel de la région et des leviers d’action permettant de réduire les facteurs de crises et de renforcer la cohésion sociale. Les travaux se poursuivent pour l’identification d’une initiative conjointe Alliance Sahel s’attaquant aux fragilités structurelles des systèmes alimentaires au Sahel tout en intégrant la dimension « prévention des conflits ».  

Ils permettront de poursuivre les efforts d’opérationnalisation du Nexus Climat/sécurité déjà mis en œuvre par plusieurs membres de l’Alliance Sahel autour de:

  • l’anticipation par l’analyse des risques, les systèmes d’alerte précoce
  • la protection en développant les mécanismes d’assurance contre les risques climatiques
  • la restauration par une meilleure gestion des terres et des ressources naturelles, la promotion de solutions basées sur la biodiversité et les écosystèmes
  • la cohésion sociale en créant des espaces pour renforcer les liens communautaires et la médiation des conflits.
Séance de sensibilisation à la santé infantile dans le cadre du programme de protection sociale adaptative TEKAVOUL, Hodh Charqui, Mauritanie

L’autre volet important de la résilience porte sur la mise en place de systèmes de protection sociale adaptative. Ces programmes ont démontré leur efficacité pour protéger les ménages les plus exposés à l’impact des chocs économiques, des catastrophes naturelles et d’autres crises. Les filets sociaux réduisent également les risques de conflits liés à l’accès à la terre et au partage des ressources naturelles.

Plusieurs membres de l’Alliance Sahel (FCDO/BMZ /DANIDA/France-AFD) contribuent déjà au Programme de protection sociale adaptative au Sahel initié par la Banque mondiale et ont décidé de s’engager plus avant pour converger et renforcer leurs appuis dans ce domaine.

Sur le terrain, il est essentiel de maintenir des actions contribuant à aider les populations sahéliennes à prévenir et s’adapter aux conséquences du changement climatique, et ceci nécessite d’assurer la continuité des interventions de développement. Cette continuité implique souvent une adaptation, voire une réorientation de l’action, surtout en milieu rural qui reste, au Sahel central, le plus fortement confronté à la violence.

À ce jour, les mesures mises en œuvre par les membres de l’Alliance et leurs partenaires ont consisté à renforcer les capacités des partenaires locaux pour appuyer les agents des projets dans les zones difficiles d’accès, à développer des dispositifs de suivi & évaluation à distance, à délocaliser ou réorienter des activités en recherchant le maximum de flexibilité.

Sensibilisation aux techniques de plantations d’arbres en milieu aride, région de Maradi, Niger.

L’Approche Territoriale Intégrée, un outil de dialogue

L’Approche Territoriale Intégrée visant à apporter une réponse mieux coordonnée aux priorités de développement d’un territoire constitue un outil de dialogue avec les autorités et communautés locales sur les priorités liées aux effets du changement climatique.

Par exemple, dans des zones fragilisées telles que le Hodh El Charqui en Mauritanie (confrontée à l’afflux de réfugiés maliens) ou le Kanem et le Barh El Gazel au Tchad où la subsistance des populations reste très dépendante d’une pluviométrie incertaine, l’ATI peut contribuer à atténuer les risques de conflits locaux liés à l’accès à des ressources naturelles limitées. 

Les enjeux liés au climat, à la sécurité, au développement et à l’humanitaire ne peuvent plus être dissociés. Les efforts d’alignement et de coordination renforcés sont plus que jamais nécessaires dans une région où le contexte évolue constamment et impose de revoir nos modes de faire. L’Alliance est plus que jamais engagée et mobilise tous ses efforts sur cet agenda.

——–

* Selon le rapport national sur le climat et le développement (CCDR, en anglais), publié par le Groupe de la Banque mondiale pour les pays du G5 Sahel

Photos crédits: Alliance Sahel/Aude Rossignol

Partager :