Séminaire: Face aux crises, renforcer la résilience des systèmes agricoles et alimentaires

Bien que disposant d’un potentiel considérable, la région du Sahel est confrontée à des défis majeurs qui l’empêchent d’assurer une sécurité alimentaire et nutritionnelle, d’offrir à ses habitants des opportunités d’emplois et de revenus tout en préservant son environnement et ses écosystèmes.

Ces dernières années, la région a connu une recrudescence de la violence et des conflits, aggravée par la présence de groupes extrémistes, qui viennent s’ajouter à un contexte persistant d’instabilité, de pauvreté et de crises politiques. Les impacts socioéconomiques de la COVID-19, le conflit russo-ukrainien et les retombées de la guerre au Soudan ont gravement affecté la sécurité alimentaire dans les pays du Sahel et le secteur agricole, exacerbant les vulnérabilités déjà liées au changement climatique, à la dégradation des sols et à la rareté de l’eau.

En raison de la combinaison de ces différents facteurs et de la forte croissance démographique, des millions de personnes sont confrontées à l’insécurité alimentaire, à la malnutrition et forcées de se déplacer. Cette crise alimentaire et nutritionnelle chronique s’aggrave rapidement, avec plus de 5 millions de personnes souffrant d’insécurité alimentaire aiguë recensées entre mars et mai 2023.


Au regard d’une situation extrêmement préoccupante et du nombre croissant des populations privés de moyens de subsistance, les réponses d’aide d’urgence se multiplient pour apporter l’aide alimentaire nécessaire et satisfaire les besoins immédiats des populations. Cependant, la récurrence des crises alimentaires au Sahel démontre que ce type de réponse d’urgence à court terme n’est pas suffisant pour enrayer le phénomène à moyen et long terme.

À cet égard, il est urgent que les autorités des pays du Sahel procèdent à des évaluations internes et inclusives afin d’identifier les lacunes, définir les priorités et fournir ainsi une vision et des stratégies à plus long terme sur lesquelles les partenaires internationaux peuvent s’aligner et qu’ils peuvent soutenir.

Les organisations régionales, telles que l’Union africaine ou la CEDEAO, jouent également un rôle clé dans le renforcement du secteur agricole, des actions humanitaires et des systèmes alimentaires au Sahel en fournissant des analyses et une assistance technique, tout en mobilisant des ressources pour soutenir les systèmes alimentaires et la transformation de l’agriculture.

Dans ce contexte et compte tenu de la complexité des facteurs de fragilité, il est essentiel de faire un état des lieux sur l’impact des crises sur l’insécurité alimentaire. Les partenaires au développement doivent également rechercher des réponses plus efficaces et intégrées pour faire face aux situations qui portent atteinte à la vie des populations en particulier dans les zones difficiles d’accès où l’insécurité alimentaire est accrue, tout en s’attaquant aux facteurs structurels de fragilité des systèmes alimentaires et en renforçant la cohésion sociale au sein des communautés.

Un atelier pour faciliter le dialogue

L’Alliance Sahel en collaboration avec le Programme Alimentaire Mondial, Tony Blair Institute et la FAO ont organisé le 8 novembre 2023 un séminaire pour faciliter le dialogue entre les principales parties prenantes, notamment les experts et les représentants des gouvernements nationaux.

Il s’agissait d’échanger perspectives, expériences et idées pour renforcer la résilience des systèmes agricoles et alimentaires dans la région. Une attention particulière a été accordée aux rôles des organisations régionales et des communautés locales, ainsi qu’à la manière dont des approches innovantes peuvent favoriser, par le biais d’une initiative de l’Alliance Sahel soutenue par plusieurs membres, un système agricole plus résilient et plus efficace, au bénéfice des populations.

Lors de l’atelier, il a été souligné l’importance de :

  • Promouvoir des initiatives de renforcement de la résilience qui ont démontré leur efficacité à maintenir la paix, réduire les besoins humanitaires et assurer la dignité des populations
  • Investir dans l’eau et l’énergie renouvelable qui constituent des ingrédients essentiels de la transformation des chaines de valeurs agricoles ;
  • Rationaliser la gouvernance des systèmes agroalimentaires et optimiser les cadres de politiques existants (telles que ECOWAP de la CEDEAO, ou encore la Politique agricole de l’Union (PAU) de l’UEMOA)
  • Limiter les pertes post-récoltes qui sont considérables et ont un impact négatif sur les marchés alimentaires (10 millions de tonnes de céréales retirées du marché)
  • Favoriser la cocréation et la flexibilité des mécanismes de financement et de conception des programmes. (Les efforts visant à créer des plateformes, des consortiums ou des alliances pour la résilience devraient être portés à l’échelle et se concentrer sur la mise en œuvre et pas seulement sur la coordination.)

Les participants à l’atelier :

  • Des représentants des membres de l’Alliance Sahel
  • Des représentants des pays du Sahel
  • Des organisations régionales (CEDEAO, CILSS)
  • Des organisations de la société civile et des groupes de réflexion
  • Des acteurs humanitaires

Intervenants

Abdoulaye Mar Dieye, Sous-Secrétaire-Général, Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le développement au Sahel

M. Dieye est un macroéconomiste et expert en développement qui a acquis, au cours des 35 dernières années, une solide expérience de leadership dans la gestion de dossiers de développement complexes. Le Secrétaire général de l’ONU a annoncé le 7 janvier 2021 la nomination de M. Abdoulaye Mar Dieye, du Sénégal, au poste de Coordonnateur spécial pour le développement au Sahel, pour diriger les efforts collectifs, y compris pour ce qui est du financement, en vue de mettre en œuvre la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et son plan d’appui. M. Dieye est actuellement Conseiller spécial de l’Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Il a occupé plusieurs postes au PNUD.  Auparavant, il a été Représentant spécial adjoint pour les opérations des Nations Unies en Côte d’Ivoire et Coordonnateur résident et humanitaire / Représentant résident du PNUD à Abidjan. Avant de rejoindre les Nations Unies, M. Dieye a occupé plusieurs postes de direction au sein du Gouvernement sénégalais. M. Dieye est ingénieur statisticien économiste diplômé de l’Institut national de la statistique et des études économiques de Paris. Il a étudié les mathématiques avancées et spécialisées au lycée national du Parc de Lyon et est titulaire d’une maîtrise en études du développement de l’Institut d’études sociales (ISS) de La Haye.

Alain Sy Traoré, Directeur, Agriculture et développement rural, CEDEAO

Alain Sy Traore est directeur de l’agriculture et du développement rural au sein de la CEDEAO depuis 2014. Mr. Traore est titulaire d’un diplôme d’ingénieur en développement rural avec une spécialisation en agronomie de l’Institut de développement rural de l’Université de Ouagadougou (Burkina Faso). Auparavant, il a obtenu une maîtrise en développement rural et en sciences techniques, avec une spécialisation en agronomie, et un Deug combinant la biologie et la géologie à la Faculté des sciences et techniques de l’Université de Ouagadougou. Avant de rejoindre la Commission de la CEDEAO en 2008, M. Traore avait plus de seize ans d’expérience en tant que conseiller et gestionnaire de projet, affilié à des agences et des institutions internationales. Il a commencé sa carrière à la CEDEAO en tant que Chef de Division, Chaînes de production et Marchés à la Direction de l’Agriculture et du Développement Rural. Au fil des années, en tant que point focal de la Direction, il a traité des dossiers de planification budgétaire, de rapports, de représentation et de négociation avec les bailleurs de fonds et les partenaires techniques. Outre la formulation et le suivi des projets, M. Traore est notamment chargé de coordonner l’ensemble des activités de la direction et de mettre en œuvre la budgétisation axée sur la performance. A cela s’ajoute la responsabilité de la mobilisation des fonds pour la mise en œuvre de l’ECOWAP ainsi que la coordination de l’appui des partenaires techniques et financiers à l’ECOWAP.

Dr. Abdoulaye Mohamadou, Secrétaire Exécutif du Comité Permanent Inter-Etats de Lutte contre la Sécheresse dans le Sahel (CILSS)

Dr. Laouali Garba, Chef de la Division de l’agriculture et de l’agro-industrie, Banque africaine de Développement

Dr Laouali Garba est chef de la division recherche agricole, production et durabilité au département agriculture et agro-industrie de la Banque africaine de développement (BAD). Ingénieur polytechnicien, Il justifie d’une expérience de plus de 25 ans en recherche et le développement, en conception et mise en œuvre de projets d’agriculture intelligente face au climat, et en mobilisation des ressources notamment des fonds climatiques pour l’adaptation de l’agriculture en Afrique. Depuis 2011, avec la Banque africaine de développement, il travaille à promouvoir une transformation durable et résiliente de l’agriculture pour la sécurité alimentaire et le développement économique dans le contexte du changement climatique en Afrique, notamment en intensifiant le déploiement de technologies climato-intelligentes et en facilitant l’accès à des infrastructures résilientes, aux producteurs.

Katie Freeman, Économiste de l’agriculture, Banque mondiale

Katie est économiste agricole principale au sein de la section Agriculture et alimentation de la région Afrique de l’Ouest et centrale à la Banque mondiale. Katie a rejoint la Banque mondiale en 2012 et a travaillé en Amérique latine sur des questions liées à l’agriculture intelligente face au climat et en Afrique sur la biomasse à destination de l’énergie et sur la résilience des systèmes alimentaires. Avant de rejoindre la Banque, Katie a travaillé à l’Institut de la Terre de l’Université de Columbia, où elle a mis en œuvre des programmes d’accès à l’énergie et d’agriculture numérique en Afrique et en Haïti, et à USAID où elle a soutenu des programmes de développement de la chaîne de valeur agricole en Afrique de l’Est. Katie est titulaire d’une maîtrise en développement économique de la Harvard Kennedy School et doctorante à l’Université de Wageningen.

Mathilde Iweins, Senior Global Technical Specialist, Natural Resources, FIDA

Mathilde Iweins est spécialiste technique principale en gestion des ressources naturelles au FIDA, où elle aide les projets à mieux intégrer et mettre en œuvre des solutions innovantes pour une agriculture et des moyens de subsistance durables. Agronome française, elle a plus de 17 ans d’expérience professionnelle dans la gestion des ressources naturelles liée à l’agriculture et à la sylviculture durables, à la réduction de la pauvreté et à la sécurité alimentaire. Elle a travaillé pour des ONG, des agences bilatérales et multilatérales où elle a coordonné la conception, la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation de projets de terrain liant la gestion durable des ressources naturelles et le développement rural à long terme. Elle possède une expérience technique spécifique dans le domaine des services écosystémiques, de la comptabilisation des coûts complets et des finances locales. Elle a une expérience de terrain dans plus de 30 pays et a vécu à Libreville, Washington DC, Delhi, Rome et Pékin avant Dakar.

Christine Plastrotmann, Senior Policy Advisor, BMZ

Maggie Janes-Lucas, Directrice régionale Sahel, Tony Blair Institute for Global Change

Maggie Janes-Lucas s’attache à relever les défis majeurs en matière de sécurité et de stabilité, d’économie et de ressources naturelles en Afrique, en particulier au Sahel et en Afrique de l’Ouest. Elle a plus de 15 ans d’expérience dans la mise en œuvre des priorités en matière d’agriculture, de santé et de paix/sécurité, et dans l’encadrement d’équipes sur le continent africain, aux États-Unis et en Asie. Actuellement conseillère principale pour le Sahel au Tony Blair Institute for Global Change, Maggie Janes-Lucas soutient les dirigeants politiques, les conseillers et les instituts régionaux en matière de stratégie, de politique et de mise en œuvre, en utilisant la technologie comme catalyseur. Elle a occupé des postes de gestion et de direction au sein d’organisations internationales à but non lucratif, des Nations unies et de USAID. Elle est titulaire d’une maîtrise en santé publique de l’école de santé publique et de médecine tropicale de l’université de Tulane et d’une licence en relations internationales du James Madison College de l’université d’État du Michigan.

Un atelier co-organisé par

En vidéo, quelques exemples de résilience agricole et de sécurité alimentaire 

Tchad: Programme de résilience du PAM
Great Green Wall: a wall against hunger
Tchad: Relever les défis de la sécurité alimentaire
Niger: Dynamique collective des femmes
Niger: la force d’entreprendre
Niger: l’incontournable maîtrise de l’eau
Mali: Transformation de fruits
Niger: Culture et transformation du moringa
Burkina Faso: Protection des sols
Burkina Faso: Faso Attieke crée de l’emploi pour les femmes
Mali: Transformation du moringa

Retour en image sur l’événement

Photos: Aude Rossignol / Alliance Sahel

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