Un forum mondial pour renforcer la protection sociale adaptative
A l’occasion du Forum mondial sur la protection sociale adaptative organisé à Berlin en juin 2023, les décideurs politiques, les praticiens et les experts de la protection sociale ont examiné et discuté conjointement de la portée et du potentiel de la protection sociale adaptative pour favoriser la résilience et se préparer aux chocs. Plusieurs membres de l’Alliance Sahel ont participé à ce forum, co-organisé par la Banque mondiale et le BMZ. À l’issue de cet événement, nous avons rencontré Dirk Meyer, directeur général Global Health Employment, Transformation of the Economy, Digital Technologies, Food and Nutrition Security, au ministère fédéral allemand de la Coopération économique et du Développement (BMZ).
Pourquoi organiser un événement sur la protection sociale adaptative à Berlin ?
Nous pensons que la protection sociale, et en particulier la protection sociale adaptative, bénéficie d’un élan politique. Notre expérience de la crise mondiale du Covid-19 et d’autres crises, telles que les chocs de prix et l’insécurité alimentaire à la suite de l’invasion russe en Ukraine, montre que le renforcement de la résilience des sociétés, et en particulier de la résilience des groupes vulnérables, est crucial pour la stabilité mondiale.
En outre, dans les pays ayant investi dans la protection sociale, les sociétés ont beaucoup mieux surmonté la crise du Covid-19 que les autres. Sur base de ces éléments, nous constatons qu’un grand nombre de gouvernements et d’organisations ont inscrit la mise en place de filets de sécurité sociale et de systèmes de protection sociale à leur ordre du jour. Nous avons voulu profiter de cet élan politique pour organiser une conférence internationale afin de tirer parti de l’expérience de chacun et intensifier les partenariats en faveur de la protection sociale.
Étant donné que la Ministre fédérale de la Coopération économique et du Développement, Mme Schultze, a fait de la protection sociale l’une de ses priorités, la conférence était également très importante pour stimuler son initiative sur l’intensification de la coopération en matière de protection sociale, avec la Banque mondiale et les organisations et agences de l’ONU.
Nous avons compris que la protection sociale était une priorité pour la Ministre fédérale de la Coopération économique et du Développement. Quels sont les engagements actuels de l’Allemagne en matière de protection sociale, notamment au Sahel ? Pourriez-vous nous en dire plus sur cette nouvelle initiative que la ministre a mentionnée, sous l’égide des Nations unies ?
La protection sociale sera l’un des thèmes importants de la présidence de l’Assemblée générale de l’Alliance Sahel que Svenja Schulze entamera en juillet 2023 – avec l’accord des membres de l’Assemblée générale. Cette décision s’appuie sur les preuves positives de l’efficacité de la protection sociale adaptative dans la région.
L’engagement précoce du BMZ et des partenaires de l’Alliance pour le Sahel, tels que la Banque mondiale, la France, le Royaume-Uni et le Danemark, dans le contexte du Programme de protection sociale adaptative pour le Sahel (SASPP) a constitué une sorte de laboratoire pour les systèmes de protection sociale adaptative. Nous avons également entamé une coopération étroite avec le PAM et l’UNICEF, qui soutiennent la protection sociale adaptative pour renforcer la résilience. Ensemble, nous avons cherché à savoir si des interventions de protection sociale adaptatives, opportunes et ciblées pouvaient réellement aider les sociétés du Sahel à mieux se préparer, faire face et s’adapter aux chocs. Il s’est avéré qu’il s’agit d’un modèle de réussite ! À cet égard, les pays du Sahel sont des pionniers dans le développement de systèmes de protection sociale adaptatifs, même s’il reste encore beaucoup à faire en termes de couverture, de financement ou de numérisation.
L’initiative de la ministre Schulze est basée sur ces enseignements tirés de la région du Sahel. Nous saluons l’Accélérateur mondial pour l’emploi et la protection sociale pour des transitions justes du Secrétaire général des Nations Unies. Mais nous pensons qu’il peut être encore plus efficace si la Banque mondiale et d’autres institutions financières internationales sont également impliquées, puisqu’elles fournissent la majorité du financement international pour la protection sociale. Comme au Sahel, le système des Nations unies et la Banque mondiale devraient utiliser leurs forces respectives, main dans la main, dans d’autres pays et régions. Les éléments clés de cette collaboration sont le soutien conjoint aux pays et le développement d’un mécanisme de financement commun ouvert à toutes les parties prenantes.
Cette année, nous contribuerons à hauteur de 7 millions d’euros de fonds d’amorçage pour faire avancer l’initiative et nous sommes prêts à fournir des fonds dans les années à venir. Nous sommes à mi-parcours et assez fiers de ce que nous avons accompli jusqu’à présent, mais il reste encore du travail. Avec notre contribution annoncée au Forum mondial, nous invitons d’autres à nous rejoindre.
Quel rôle la protection sociale adaptative peut-elle jouer pour apporter une partie de la réponse à la crise dans certains contextes fragiles, notamment au Sahel ? Quels sont les facteurs de réussite ou les exigences? Quels sont les défis qui nous empêchent d’avancer plus vite et plus loin dans ce domaine ?
Tout d’abord, face aux crises et aux chocs, nous devons atteindre les groupes les plus vulnérables à temps et de manière ciblée. Un système de protection sociale adaptatif permet de surmonter les chocs immédiats et d’acheminer les fonds vers les personnes touchées par les chocs en temps voulu. Un tel système permet également de mieux se préparer aux chocs futurs.
Notre principal défi, c’est l’engagement des gouvernements nationaux. Les organisations multilatérales ou les contributions bilatérales ne peuvent pas mettre en place des systèmes de protection sociale nationaux et adaptatifs. Nous avons besoin de l’appropriation et de l’engagement des gouvernements. Nous avons besoin d’une structure de gouvernance dans nos pays partenaires qui surmonte les silos et intègre tous les acteurs nationaux concernés, et pas seulement les ministres des Affaires sociales ou rurales. À mon avis, l’Alliance Sahel peut jouer un rôle important dans le futur dialogue sur la protection sociale avec les gouvernements du Sahel.
Bien entendu, nous avons également besoin d’un soutien fort de la part du système multilatéral et d’une coopération étroite avec les institutions financières, telles que le FMI. Les ministres des Finances s’engagent de plus en plus en faveur de la protection sociale, car ils comprennent son potentiel pour renforcer la résilience aux chocs. Garder tous les acteurs impliqués pour la protection sociale adaptative est le défi que mon ministère relèvera dans les mois à venir. Nous espérons que l’Alliance du Sahel sera un allié solide !
Le Forum mondial sur la protection sociale adaptative a été organisé conjointement par le ministère fédéral allemand de la Coopération économique et du Développement (BMZ) et la Banque mondiale, avec des partenaires. L’événement a eu lieu à Berlin, en Allemagne, du 13 au 15 juin 2023.
Dirk Meyer a étudié l’histoire et la langue et littérature allemandes à l’Université de Bielefeld, en Allemagne, et à l’University College Cork, en Irlande. Après sa formation universitaire, il a dirigé le bureau du député européen de la circonscription d’Ostwestfalen-Lippe, en Allemagne. De 1996 à 2018, M. Meyer a travaillé dans différents ministères de l’État fédéral allemand de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, en dernier lieu en tant que directeur général du ministère de l’Innovation, des Sciences et de la Recherche de l’État de Rhénanie-du-Nord-Westphalie. D’avril 2018 à décembre 2021, il a été directeur général au ministère fédéral de l’Environnement, de la Protection de la Nature et de la Sécurité nucléaire.
© Photothek
Aller plus loin
